3.24.2005

Boire et noyer

Je me sens belle avec la pluie sur le visage
La fatigue, l'eau, les larmes, me lavent toute entière
Ruissellent les peurs et les indifférences
Goutte à goutte doucement sur ma peau
Mais demeure au contact cette odeur de liquide, l’envie d’ouvrir les lèvres, de boire une chaleur diffuse. Envie d’être noyée, de le voir me noyer avec ses grandes mains et sa force si douce. Etre ruisselante et nue. En secret, en offrande. Divisée en affluents multiples, ces petites rigoles qui tracent autour de lui un fin réseau d’envies, de désir éperdu, et de curiosité aussi.

Un jeune dieu sauvage

C’est une telle beauté souterraine, c’est une telle marée obscure, ce sang qui court et roule dans les cavernes de mon cœur, ce grondement doux et fluide, cette respiration, ce vide.
Un reflux d’émotion, un soupir, une longue inspiration, un battement de paupière.
Il est si beau, mon dieu, et si jeune encore, ce désir ces mystères ces heures qui se croisent, et mon cœur s’agrandit comme pour le recevoir, sans un bruit, sans un éclat. Sans une cassure de chair au murmure fragile ; sourd comme un coquillage à l’oreille, le mouvement lent des pulsations de mon sang, vers toi, vers toi, vers toi.

3.23.2005

Blanc comme neige, transparent comme un fantôme

Je les regarde tous,

Et tu n’es parmi eux.

Et les détailler, tous, et les envisager

Et ne jamais trouver

Autre chose que ce jeu, ces masques,

L’interminable absence de ma réalité

Mon univers mon fantôme.

Imaginer tes gestes, tes regards

La respiration courte.

Tu es ma poésie secrète

Tu es ma nuit et mon rivage

Tu es mon plus précieux abîme

Ma solitude, mon désert


Ca et eux

L’angoisse m’est revenue, avec elle son cortège de fantômes grinçants, les vagues tremblantes de froid de précipices.

L’angoisse, la glace, la peur de faire mal, la peur de mal faire, d’être mal, d’avoir mal.

Les tourbillons d’écume autour de ma tête, l’irrationnelle présence du pire, toujours proche, sans cesse à venir.

Les mots qui trébuchent et s’entrechoquent.

La honte, pesante, qui colle à mes gestes. Un décalage élaboré, nourri, entre fantasmes et envies ; désirs, motivations, prudence.

Les serrures qui se ferment une à une à l’intérieur de moi. Faire croire que. Donner le change ; échanger moi pour moi, et toute la peine du monde à trouver une échappatoire.

Ces regards qui interprètent, qui analysent, qui croient tout deviner. L’idée de savoir mieux que moi largement partagée, entre eux et moi, pas de distances.

Pas de recul.

Je n’arrive pas à trouver l’air.

Je ne respire plus.

Je ne respire plus.

3.22.2005

Bataille

C’est quoi, lutter contre ?

Mon visage redevient nu et lisse comme au premier jour de ma vie, où je ne connaissais pas encore la douleur de toi.

Ma figure redevient ce terrain lisse et nu aux frontières floutées, où s’affrontent aujourd’hui manque et désir de toi, en charpie, en bataille.

Aussi immobile que l’eau, aussi immobile que l’air je suis deux et je ne suis qu’une, celle qui mord pour toi et qui crie.

Celle qui se tait et regarde se défaire, autour d’elle, comme un grand vent, les morceaux de silence empilés par les ans. Où s’effilochent celle qu’elle croit et celui qui n’est pas, plus ou perdu.

J’ai des mots qui se frôlent dans ma tête, inconstants, errants, inachevés parfois, dérisoires toujours. J’ai des bouts de ma tête qui te frôlent.

Toutes les parties de moi se désunissent et s’enroulent en spirale, ma chair éclate et roule sous la paume, je voudrais,

je voudrais.

Oubliés sommeil moutons rêves bleus

J’ai oublié le rêve, et l’angoisse du réveil.

Je me suis transformée en fourmi batailleuse, travailleuse, pointilleuse, tous ces mots qui se prononcent bouche fermée.
Je suis à demie nue, cachée autour de mon ventre, égoïstement, absolument, par survie et par réaction, par incapacité à voir de nouveaux signes.
Je suis un ventre, un ventre rond et doux, et un corps qui est mon arme de lutte.
Je suis une bouche, et des yeux qui aiment, mais qui ne peuvent pas plus, et rassurer et lutter, et se concentrer et s’oublier.